POUR LA SCIENCE

Thèse de la double « affection » confirmée.

Le Covid-19 est essentiellement une infection du système respiratoire, des muqueuses nasales jusqu’au plus profond des poumons et les symptômes sont localisés dans cette région, de la toux à la détresse respiratoire.

Pour autant, le système digestif et les intestins ne sont pas toujours épargnés. De fait, plusieurs malades souffrent de désordres gastro-intestinaux : diarrhées, vomissements…

 

De tels symptômes sont-ils rares ? Non, à en croire une étude chinoise menée par Lei Pan, de l’université de Binzhou, en Chine. Le suivi de 204 malades (confirmés par RT-PCR) a révélé que près de la moitié d’entre eux souffraient de troubles digestifs qui sont allés s’aggravant à mesure que l’infection par le coronavirus empirait.

 

On a également découvert de l’ARN viral dans les selles de malades et même des virus « vivants ».

De quoi s’interroger sur les liens entre le coronavirus et l’intestin. De fait, on sait que le SARS-CoV-2 infecte les cellules dotées à leur surface du récepteur ACE2 auquel s’associent les protéines S dont est orné le virus. Très présent dans les cellules du système respiratoire, ce récepteur est aussi abondant dans celle du tube digestif, intestin compris comme l’avait montré en 2004 une équipe de l’hôpital universitaire de Groningen, aux Pays-Bas. (À vrai dire, on trouve le récepteur ACE2 dans à peu près tous les organes, comme les vaisseaux sanguins, les muscles lisses…).

Le nouveau coronavirus est donc capable d’infecter les intestins et s’y multiplier.

 

Une autre observation relie le coronavirus aux intestins. Dans le suivi de 1 099 malades dans 552 hôpitaux chinois, les biologistes ont remarqué que ceux souffrant d’une maladie inflammatoire chronique de l’intestin, comme la maladie de Crohn, avaient une plus grande prédisposition à développer une forme sévère du Covid-19. Rappelons que ces pathologies intestinales sont souvent le fruit, au moins en partie, d’un déséquilibre dans la composition du microbiote. Dans ce cadre, une perturbation de la flore intestinale favoriserait des processus inflammatoires déjà amorcés par le coronavirus et aggraver la maladie, dans une sorte de cercle vicieux.

 

Des transplantations de microbiote plus contrôlées

 

Ces liens ont eu une conséquence : le 16 mars 2020, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a décidé, après avoir pris acte du risque de transmission du coronavirus via une transplantation de microbiote fécal (TMF), de considérablement renforcer les précautions à prendre dans cette pratique. Celle-ci est préconisée pour traiter des infections intestinales à Clostridium difficile (des diarrhées nosocomiales chez les patients sous antibiothérapies) et étudiée dans plusieurs essais cliniques.

 

Pour comprendre les liens entre Covid-19 et microbiote, on doit aussi tenir compte de l’axe intestin-poumon, un système de communication entre la flore intestinale et celle des poumons récemment mis au jour et dont le rôle est de mieux en mieux connu. Ainsi, le microbiote intestinal influerait sur les réponses immunitaires pulmonaires lors d’infections, de la présence d’allergènes… Et des études ont montré que cet axe intervient dans diverses pathologies comme l’asthme, la grippe, la bronchiolite… D’où l’idée que le microbiote serait peut-être une piste intéressante à suivre par les chercheurs dans le cadre de la lutte contre le Covid-19.

 

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